le coeur du grenache Sarde
J’adore la Sardaigne. J’y vais l’été depuis quelques années.
Là-bas je suis allé à la découverte de Giovanni Montisci sur les recommandations d’une amie qui travaille elle-aussi dans la tonnellerie. Dans la région de Mamoiada. Lors de notre première rencontre je ne parlais pas l’italien, lui très mal l’anglais. Mon épouse faisait la traduction.
De retour en France je me suis fait deux promesses : apprendre l’italien, et faire connaître ses vins car ils valent VRAIMENT le détour. Et le personnage est attachant. Dans une vie antérieure il était mécanicien, et est venu à la vigne par goût. Il travaille seul deux hectares de vignes quasiment toutes centenaires. Du Grenache principalement (Cannonau). Un peu également de Nebbiolo (le cépage du Barolo) et de Granazza (cépage sarde blanc).
J’ai tenu mes promesses. Je commence à balbutier la langue de Dante, et donc j’ai pu échanger avec lui pour faire ma première commande. Voici ses vins. À déguster les yeux fermés et les sens ouverts.
Je vous laisse découvrir…
COUP DE COEUR DU 25/02/2023
« Hier soir j’ai été traversé par une émotion à laquelle je n’étais pas préparé. Puissante. Inattendue. Bouleversante. Et pourtant il m’en faut.
Cela fait plus de quarante ans que je déguste beaucoup de vins. Que je lis beaucoup sur le vin. Et je suis toujours aussi curieux. Peut-être même plus. Les belles étiquettes m’ont un jour attiré, j’ai épluché les guides, écouté les « sachants ». Je les recherche aujourd’hui un peu moins, et je chemine à la quête de l’improbable, du jus qui échappe aux règles, aux conventions. Du bel artisanat, loin de tout stéréotype ou marketing. À la recherche d’une certaine vérité, d’un absolu, de l’absolu de mes papilles.
Et la semaine avait déjà été marquante. Je l’ai passée dans le Sud, entre Les Alpilles de Saint Remy et les Baux de Provence, le nez plongé dans des Zalto ou d’autres verres plus simples, humant et crachant (parfois) des jus encore hésitants et d’autres déjà aboutis, naviguant autour de demi-muids de chêne blonds ou de foudres plus âgés. J’ai côtoyé la garrigue, la myrte, les herbes sauvages et le poivre incisif, l’olive noire et la truffe. Quelle belle région, trop assimilée aux « vins piscine » et aux stars (ou holdings) qui y investissent. Un seul rosé dans ma semaine, chez Frédéric de la Roque Forcade. Mais un rosé ovni, surprise, vinifié comme un blanc dans un 500 litres de chêne neuf, qui a même surpris son œnologue, habitué au chêne toasté qui planche et dessèche les papilles.
Et des rouges ou blancs comme je les aime. Marqueurs de leur roche, de leur sable, de leur terroir. Pas natures mais naturels. La différence est importante à mes yeux car j’aime retrouver dans le vin son origine, son sol, et non un goût déviant ou celui aujourd’hui trop généralisé du « nature à tout va » qui gomme cépage et origine.
J’aime les nez, mais peut-être encore plus les structures en bouche. De belles attaques qui laissent présager du meilleur, des milieux de bouche amples, et une finale longue avec de jolis amers ou salés. Des structures qui sont présentes, sans pour autant détruire les gencives. J’aime quand j’ai du mal à recracher.
Et hier soir, la claque de l’année. De la décennie. Celle qui vous fait immédiatement quitter la pièce et voyager. Et puis vous remarquez dans l’œil de votre ami le même flash, la même émotion. Pas un seul mot échangé. Aucun commentaire clinique. Pas la peine de parler de profondeur devant l’insondable. Ni de fruits dans un tel jardin d’Eden. Velours, puissance, onctuosité, tension… oui, bien sûr, certainement. Mais pourquoi utiliser des mots réducteurs. Le coup de foudre se vit, ne se raconte pas.
Hier soir j’ai rencontré la Riserva Franzisca de Giovanni Montisci. »